Secrets
Juin 2015

“Ne le dis à personne, c’est un secret…” ” ça sera notre secret” , “personne ne doit savoir”…

Et voilà en quelques mots comment on emprisonne et empoisonne corps et âmes…

Le secret est différent du mensonge. Un mensonge est passager. Il peut nous aider à passer un obstacle en nous évitant de nous casser une jambe. Ce n’est pas très glorieux, mais on s’en sort pas si mal. Parfois, ça peut nous sauver d’une situation embarrassante, ou sauver notre couple, ou notre tranquillité. Et puis on l’oublie, ça passe, ça n’engage que nous. Un petit moment de faiblesse et puis c’est reparti. Tant qu’il ne devient pas chronique, tant qu’il ne nous définit pas, le mensonge reste à sa place ; on s’en accomode, ou pas.

Le secret est d’un autre ordre. Le secret s’inscrit dans la durée. Il s’imprime sur notre psyché, il envahit nos cellules, il s’insère dans tous les recoins de notre corps ; pas une parcelle n’y réchappe.

On garde un secret, on le vérouille à l’intérieur de soi, et ce faisant, on se vérouille aussi. On ne peut pas garder un secret sans s’enfermer de l’intérieur. A partir de ce moment, la vie ne rentre plus, ne sort plus. Elle tourne en rond, inlassablement, à l’intérieur d’un corps qui souffre, d’un esprit qui lutte, d’une conscience qui abandonne. Elle se nécrose et transmettra ce mal être aux générations futures.

En nous enfermant, le secret fait de nous à la fois des prisonniers et des geôliers, des malfrats et des juges tous puissants.

En nous octroyant le droit de cacher la vérité, souvent pour protéger ceux que nous aimons, nous nous mettons en décalage par rapport à eux. Nous savons, ils ne savent pas. Comment alors communiquer, partager, consoler et tout simplement être authentique avec les autres ?

Ces autres qui vivent désormais dans une fausse réalité, qui savent sans savoir. Nous les mettons eux aussi en décalage. Jusqu’au jour où la vérité éclate. Après plusieurs années, plusieurs générations. Le temps ne l’adoucit pas. Bien au contraire. Elle se démêle souvent dans la souffrance et laisse des zones d’ombre.

Le dépositaire du secret devient alors le bourreau, la personne à qui le secret est révélé, la victime et le résultat est bien souvent l’impression de gâchis et le sentiment d’avoir été dupé et parfois pire, nié dans son identité.

Bien sûr, ce n’est pas facile de révéler un secret. On a honte, on a peur. La peur est l’une des raisons principales de l’existence d’un secret. L’opposé de la peur n’est pas le courage mais l’amour.

Le secret nous empêche de donner et de recevoir de l’amour.

Alors avant de dévoiler un secret il faut parfois beaucoup de temps, beaucoup d’amour pour soi-même, beaucoup d’amour pour les autres. Il faut l’envie de se libérer et de libérer les autres, car même si l’on a peur des conséquences, le plus beau cadeau que l’on puisse faire et se faire en dévoilant un secret, est de rendre sa vie et son histoire à la personne que l’on a spoliée.

 

Love,